Quel pied!

Publié le 16 mai 2011

Pattes avec début de nécrose

Patte saine de poulet

L’examen des pieds de nos poulets pourrait s’avérer un indicateur fort utile pour les prenants du programme de soins aux animaux (PSA) afin de déterminer le bien-être de ceux-ci lors de l’élevage. Je nomme ce grand mot: la pododermatite (ou dermatite de contact). La pododermatite est une inflamation de la peau affectant la région plantaire des pattes de poulets et dindes qui peut aller jusqu’à provoquer des légions légères à sévères. Lorsqu’il y a lésion, cette dernière peut servir d’entrée à certains microorganismes dont le Staphylococcus aureus et créer des infections secondaires.

Depuis quelques années, en Europe, en Norvège notamment, l’industrie et les producteurs ont travaillé ensemble pour améliorer cette condition des pattes et établir une densité moyenne d’élevage à 36 kg au mètre carré.

La pododermatite a une importance au point de vue du bien-être animal, mais elle a aussi un fort potentiel de retour économique. En 2009, les États-Unis ont vendu 421 000 tonnes de pieds de poulet à la Chine qui s’en régale! Ceci représente une valeur de 280 millions de dollars. Par contre, cette vente représente seulement 40 à 50 % de tous les pieds produits, car le restant ne rencontre pas les normes exigées.

Une des grandes problématiques de la pododermatite est l’humidité des litières, laquelle est la résultante de plusieurs facteurs. Un de ceux-ci est l’augmentation de la consommation d’eau des poulets en fonction de l’âge. Celle-ci est une résultante directe de la prise de poids plus rapide des oiseaux qui provient, entre autres, d’une consommation alimentaire plus élevée qu’auparavant. La différence de consommation d’eau des poulets entre l’an 2000 et aujourd’hui, à l’âge de 28 jours, représente une augmentation de 20 à 25 % plus d’eau (environ 3000 litres versus 3700 par 1000 oiseaux)! Comme 70 à 80 % de cette eau se retrouve expirée dans l’air ou rejetée dans la litière, ça représente beaucoup d’eau à ventiler pour sortir celle-ci de la bâtisse.

Sachant cela, l’épaisseur de la litière à étendre devient importante. Des expériences faites à l’université de la Georgie démontrent que ça prend de 3 à 5 pouces de litière versus 1 pouce seulement pour avoir une bonne qualité de pieds. Le type de litière devient aussi important. La capacité de la litière à absorber l’humidité représente un facteur de premier ordre. La grosseur des particules a une grande influence sur celle-ci ainsi que sur sa capacité à l’évaporer. Disons que le sable semble représenter un premier choix suivi de la ripe de bois mou pour finir par la paille (très influencée par la longueur des brins). Bien sûr le sable est un élément difficile à envisager. Le coût du substrat a aussi une grande influence sur le choix à faire.

La régie des lignes d’eau devient importante. Il faut s’assurer de la hauteur appropriée de celles-ci ainsi que de la pression adéquate dans les lignes de tétines pour ne pas favoriser d’éclaboussures d’eau par terre. Il devient aussi important de bien entretenir ses lignes en les nettoyant régulièrement avec un acide et/ou peroxyde afin d’éviter un écoulement d’eau des tétines.

Enfin, le contrôle de la ventilation représente un point majeur pour contenir l’humidité relative de la bâtisse dans une zone autour de 60 %. Qui dit ventilation dit quantité d’air rejetée par les ventilateurs ainsi qu’une projection adéquate du flux d’air dans la bâtisse afin de brasser l’air sans créer de courants d’air sur les oiseaux. La température maintenue a aussi son importance dans l’établissement de l’humidité relative.

Le bien-être animal peut parfois sembler être un frein à nos actions, mais parfois il peut représenter une opportunité d’affaires à exploiter. Qui saura l’exploiter? On pourra peut-être y prendre son pied…

(Adaptation articles Université Georgie, mai et octobre 2010.)

Par François Lefebvre, agr. M.Sc.  Expert-conseil avicole