Publié le 25 janvier 2012
Lors de l’élaboration de rations pour les vaches taries et les vaches en transition, nous faisons souvent face à deux problématiques; la première, récurente depuis plusieurs années et plus souvent dans certaines régions, la concentration élevée en potassium des fourrages; la deuxième, plus spécialement lors des deux dernières années: des fourrages trop riches en protéines et énergie pour les besoins moindres des vaches taries. Nous avons souvent entendu dire, au cours des deux dernières années: <Depuis le temps que vous me dites de faire des bons fourrages, et maintenant, ils sont trop bon!?!?>. Un peu paradoxal, en effet, mais n’oublions pas que la quantité de foin nécessaire pour la transition ne représente que 5 % des besoins totaux. Nous y reviendrons.
Nous connaissons tous l’importance de la préparation au vêlage, tant du point de vue nutritionnel que du point de vue régie et confort. La problématique du potassium en préparation au vêlage vient du fait qu’un apport élevé de ce nutriment augmente le bilan cation-anion, bilan théorique dont le calcul est celui-ci :
BCA = (K + Na) – (Cl + S)
Cette augmentation du bilan cationique risque fort de pro – voquer l’hypocalcémie et, à la limite, une fièvre du lait. Dans la base de données du DSA, nous rapportions 2,6 % de fièvre du lait en 2010 et nous évaluons les coûts dus à une fièvre du lait à 500 $ pour les traitements, la perte de lait, l’effet négatif sur la reproduction, la réforme et la mortalité (Jean Brisson, Debora Santschi et Silvia Lefebvre, Le Producteurde lait, mai 2011). (Fig. 1, hypocalcémie)
Or, nous estimons que pour chaque cas de fièvre du lait, il y aurait dix cas d’hypocalcémie, ce qui peut entraîner des conséquences fâcheuses. Une concentration plasmique égale ou inférieure 5,6 mg/dl diminue la contraction des muscles lisses, diminue la force de contraction de la caillette de 50 %, diminue la contraction du rumen et, par conséquent, la consommation de matière sèche, ce qui a pour effet d’augmenter l’utilisation des réserves. Toutes ces réactions peuvent provoquer d’autres désordres métaboliques. Vous aurez compris, comme en fait foi la figure 1, qu’une fièvre du lait ne représente que la pointe de l’iceberg.
Le paradoxe du potassium, c’est qu’il est grandement nécessaire pour la vache en lactation. La figure 2, par exemple, démontre les résultats positifs sur la production d’un bilan cationique élevé en lactation pour des rations basse en concentré (LC) et haute en concentré (HC). (fig. 2, bca)
Plusieurs autres recherches, dont celle de Harrisson et al en 2011, ont démontré des effets bénéfiques sur la CVMS, la production de lait et de gras.
Aussi, la fertilisation des champs en potassium, qui entraîne une plus grande concentration en potassium de ces fourrages, comporte plusieurs effets positifs : Sur la qualité, (Grewal and Williams, 2002), le rendement, (résultats de la Ferme Techno-champs), la résistance des luzernières à l’hiver et finalement sur la production laitière par son apport élevé en potassium.
Doit-on se priver de tous ces avantages du potassium : production laitière, qualité et rendement des fourrages (souvent un des points faibles des entreprises laitières) pour combler de façon efficace 5 % de nos besoins? Bien sûr, ce 5 % pour les vaches en transition est essentiel, voir même crucial, mais ne représente tout de même qu’une petite quantité.
Au fait, qu’est-ce que cela représente au juste? Prenons un exemple d’un troupeau de 100 vaches pour faciliter les calculs ainsi que les comparaisons avec d’autres grosseurs de troupeau. Dans ce troupeau, il y aurait :
• 15 % vaches taries
• 5 % vaches en transition
• 12 kg MSF/vache
• 100 vaches = 5 vaches en transition à l’année 14 kg (88 % M.S.) x 365 jours = 25 500 kg/15 kg
• 1700 balles (vs 32 400 balles en lactation)
Le foin fertilisé au chloromil permet de diminuer le bilan cationique du foin de 250 mEq/kg en moyenne (résultats de ferme de recherche en 2005). Haybec, un regroupement de coopératives, offre du foin fertilisé avec du chloromil pour 220 $/tms plus le transport. Il en coûte environ 30 $ la tonne pour le transport, en fait, encore récemment, il en a coûté 1 000 $ pour 33 tm livrés à Joliette de Rimouski. Donc, un coût final de 255 $/tms (ou 220 $/T TQS). Les coûts de productions réels du foin sont très variables d’une ferme à l’autre mais, selon Valacta, nous pouvons l’évaluer à 178 $/tms en moyenne. La différence de coût entre une ration anionique ou non (TransimilTM vs TransilacTM) est de 0,20 $/jour ou 4,20 $ par vache pour toute la période de transition. Si nous calculons le coût supplémentaire en foin, soit de 255 $ vs 178 $, pour des vaches consommant 12 kg de MSF, nous avons 0,92 $ par jour ou 20 $ par vache. Donc le coût total d’une ration avec anion et Transi-foin est de 24 $ de plus par vache comparé à une ration standard. Rappelons que les coûts d’une seule fièvre du lait sont de 500 $!!! Il est difficile d’évaluer le coût réel des différents désordres métaboliques, mais en regroupant plusieurs analyses, la plupart des intervenants s’entendent pour évaluer les pertes entre 200 $ et 500 $ selon le type et la gravité des désordres. Les économies reliées à la diminution de l’hypocalcémie en début de lactation et, par conséquent, la diminution de risque d’autres désordres métaboliques ainsi que des bénéfices reliés à un meilleur départ en lait sont donc indéniablement intéressants. Le BEN (bilan énergétique négatif) se transforme en BEP, bilan économique positif!!!
Certains auront remarqué que le coût de transport de 30 $ la tonne est valable pour un voyage de 33 tm. Or, s’il faut 25 tonnes de Transi-foin pour un troupeau de 100 vaches, il n’en faut que 12,5 pour un troupeau de 50 vaches, ce qui est plus représentatif de certaines régions. Voilà l’occasion de régler l’autre problème dont nous avons parlé en début d’article : nous avons du foin trop riche pour les vaches taries!! Nous pouvons aussi se procurer un foin pour les vaches taries pour 160 $ tm plus transport (190 $), ce qui pourrait nous permettre de diluer nos fourrages pour arriver à bien équilibrer nos rations de vaches taries. Rappelons que tous ces fourrages sont vendus avec une analyse garantie. Il y a aussi la possibilité de remplir le voyage avec de la paille, une denrée rare dans certaines régions cette année. Enfin, il pourrait aussi être intéressant de regrouper les besoins de quelques producteurs d’une même région pour minimiser les coûts de transport.
En conclusion, l’achat de Transi-foin et/ou de foin pour les vaches taries peut s’avérer un choix économique pertinent, mais au-delà de l’économie, il s’agit d’une solution simple dans le cadre de l’approvisionnement de fourrage spécifique pour les rations de taries et transition. Cette solution « clé en main » permet à l’entreprise de se concentrer sur les aspects positifs du potassium tant pour la régie des fourrages (fertilisation, rendement et survie) que pour la production laitière (CVMS, lait gras, etc.) sans se préoccuper sans cesse de produire une partie du fourrage pauvre en potassium pour une petite partie des besoins.
Ah! Et comme dernier point, quand il n’y en a plus… nous n’avons qu’à en commander d’autres!!!
Par Hugues Ménard, t.p. Conseiller spécialisé, ruminant La Coop fédérée