Folle Farine, celle qui est si fine

Publié le 25 novembre 2021

Par Mélisa Tranchemontagne, conseillère en communication

L’avant Folle Farine

Il y a bientôt 30 ans, Diane Destrempes et Denis Champagne faisaient l’acquisition, de la portion grandes cultures, de la ferme des parents de ce dernier. Le lopin de terre de 20 hectares, situé à Lanoraie dans la région de Lanaudière, permettait alors au couple de conserver leur emploi respectif à l’extérieur. C’est après avoir fait croître l’entreprise graduellement et s’être formés en gestion agricole au Cégep régional de Lanaudière qu’ils ont décidé de consacrer leur carrière exclusivement à la Ferme Diane et Denis Champagne. À cette époque, le couple était bien loin de se douter qu’un jour il produirait également des farines biologiques.

Cultivant jusqu’à plus de 1200 hectares, principalement en maïs, soya et quelques céréales, l’entreprise s’est munie d’un plan de séchage et d’entrepôts. La ferme entreposait alors jusqu’à 8000 tonnes de maïs-grains. En plus des productions traditionnelles, le couple semait une parcelle restante en sarrasin, ce qui lui permettait de produire sa farine pour faire de bonnes galettes tout l’hiver et de fournir famille et amis. Un peu plus tard, Diane et Denis installèrent également un petit kiosque de vente à la ferme au bord de la route 138.

 

La transition vers une régie biologique et la production de farine

Au début des années 2010, la tendance du marché, l’envie de pratiquer une agriculture durable, et une hausse du coût des intrants et des locations de terre ont mené le couple à réfléchir. C’est en 2014 que la transition de l’entreprise vers une régie biologique s’est amorcée. Considérant la période de 36 mois requise pour effectuer ce changement aux champs, plusieurs locations à court terme ont été mises de côté pour concentrer les efforts sur les terres avec un plus grand potentiel.

Depuis 2017, la totalité de la production est biologique et la superficie cultivée réduite à 650 hectares. C’est à ce moment que Diane eut une idée. « On a maintenant de beaux grains de sarrasin biologiques, mais notre farine ne peut pas être certifiée bio à cause de l’endroit où nous faisons moudre nos grains. Pourquoi on ne s’achèterait pas un petit moulin pour les moudre nous-mêmes ? »

Si Diane a les idées créatives, Denis, lui, a le côté entrepreneur bien développé. Il n’en fallait pas plus pour que le duo se procure son premier moulin de bois, provenant de France. Alors en mesure de transformer eux-mêmes leurs grains biologiques en farine bio, ils commercialisèrent leur farine de sarrasin maintenant certifiée. Les ventes allaient bon train, l’engouement était présent ; alors, pourquoi ne pas produire d’autres variétés de farine et augmenter la production de grains y étant destinée ? Ils ont donc intégré le blé, l’épeautre, le maïs, puis le seigle graduellement. C’est à ce moment qu’est née « Folle Farine ». On ne naît pas meunier, on le devient. C’est donc avec beaucoup de lecture, d’autoformation et d’essais et erreurs qu’ils ont réussi à trouver leurs formules gagnantes.

 

La mise en marché de Folle Farine  

Forts de leur expérience en gestion d’entreprise, encore fallait-il qu’ils sachent bien s’entourer pour les nouveaux défis devant eux, tels que le marketing, la mise en marché et la distribution. Pour les aider à prendre leur envol sur des bases solides, ils ont fait appel à la Boîte à Start Up de Berthierville, qui les a épaulés dans leur projet. Le nom de Folle Farine est quant à lui le fruit d’une recherche de nom de commerce qui a abouti sur une citation qui inspira les propriétaires : « Folle farine, celle qui est si fine que, l’air l’enlevant, elle s’attache aux murs des moulins ».

Au début, c’est vertigineux ! « Quand tu as l’habitude de vendre des camions de grains de 40 000 kg et que tu te retrouves à vendre à coup de sac d’un kilogramme de farine, c’est un autre monde », souligne Diane.

Il y a aussi les défis de parts de marché : entrer dans les épiceries peut s’avérer difficile. « Bien sûr, tu commences par ton coin, les épiciers que tu connais, et ensuite tu t’implantes dans ta région », se rappelle le couple. Avec près d’une cinquantaine de points de vente dans sa propre région, l’entreprise réussissait à bien tirer son épingle du jeu, mais au fur et à mesure que l’entreprise s’agrandissait, certaines parties devaient être déléguées.

En 2020, une représentante a été engagée pour développer les parts de marché, élargir le territoire jusqu’à Montréal, Laval, la Mauricie et la Rive-Sud, et créer un lien avec un distributeur externe.

 

La pandémie, défis ou opportunités ?

Sans faire de jeu de mots, Diane le confirme : « Oui, la pandémie a amené de l’eau au moulin. » Elle se rappelle qu’en avril 2020, lorsqu’il manquait de farine sur les tablettes des épiceries, il y a eu une augmentation considérable des ventes de leurs produits en ligne. C’est une fierté, puisqu’une bonne partie des consommateurs qui ont découvert leurs produits sont devenus des clients réguliers. Cela a aussi amené des défis, car le petit moulin ne produisait que 20 kilos de farine à l’heure. Il fonctionnait cinq jours par semaine, du matin au soir, et ce, sans arrêt grâce à deux ou trois employés en alternance. Il a donc fallu acheter un autre moulin et un tamiseur plus gros.

 

L’avenir et la relève, une histoire de famille

Aujourd’hui, Folle Farine est présente dans plus de 100 points de vente, en ligne ainsi qu’à la boutique de la ferme au 327 Grande-Côte Est à Lanoraie, avec six variétés de farines biologiques :

  • Farine blanche non blanchie
  • Farine d’épeautre intégrale
  • Farine de blé intégrale
  • Farine de maïs
  • Farine de sarrasin
  • Farine de seigle

La construction d’un entrepôt pour permettre de stocker une petite quantité de farine, sans négliger la fraîcheur, est en cours. La Ferme Diane et Denis Champagne continue d’opérer en productions végétales, mais les propriétaires passent tranquillement le flambeau à leurs deux neveux. Ceux-ci ont déjà leur entreprise de grandes cultures biologiques et ont entamé l’acquisition de plusieurs des terres au cours des dernières années.

La plus jeune des deux filles de Diane et Denis, Marjorie, a quant à elle rejoint Folle Farine. Elle est déjà bien impliquée dans les différentes sphères de l’entreprise. Le souhait du couple est de lui laisser une entreprise bien installée, dont elle pourra prendre la relève quand viendra le temps.

Parlant de relève, si Diane a un conseil à donner à ceux ou celles qui sont en démarrage d’entreprise de transformation en parallèle de leur entreprise actuelle, c’est de gravir les marches une à une et de bien s’entourer.

Afin de poursuivre sa mission d’entreprise responsable, l’évaluation d’un projet d’économie circulaire avec d’autres entreprises de la région est en cours. En collaboration avec le Conseil de développement bioalimentaire de Lanaudière, dont Diane est administratrice, différentes avenues sont présentement analysées afin d’optimiser les rebuts — qui sont tout de même compostés pour le moment — en les utilisant à d’autres escients et en les rentabilisant.

Une chose est sûre, grâce ses idées innovantes, nous n’avons certainement pas fini de retrouver les produits de grande qualité de la famille Champagne sur nos tablettes et dans nos cuisines !