Pour comprendre l’ensilage

Publié le 14 novembre 2012

Le foin s’obtient par le séchage sous l’action du soleil et est complété par en grange au moyen de séchoirs. De cette façon, le foin engrangé se conservera de façon sécuritaire, en ayant un taux d’humidité inférieur à 15 %. Il est difficile de prévoir ce qu’il fera demain et malheureusement de garantir du beau temps pendant la récolte. La pluie peut retarder le séchage et engendrer un foin de moindre qualité. La poussière contenue dans le foin est un signe que ce dernier a été pressé trop humide et qu’il a chauffé lors de son entreposage. Le foin récolté dans de mauvaises conditions sera peu appétant et n’aura qu’une faible valeur alimentaire. (voir article sur le foin) 

L’ensilage d’herbe est une solution alternative non poussiéreuse qui peut contribuer à empêcher le cheval de développer des difficultés respiratoires et peut alléger la toux des chevaux sensibles à la poussière. Le chantier de récolte de l’ensilage d’herbe ne nécessite que deux jours de beau temps, comparativement au foin sec qui demande de trois à quatre jours exempts de pluie. On peut réellement parler d’ensilage lorsque le fourrage est en dessous de 50 % de matière sèche. La production d’ensilage met en œuvre la fermentation des sucres des fourrages par des bactéries en l’absence d’oxygène, ayant pour but de maximiser la conservation des nutriments contenus dans le fourrage. Le fourrage se conserve grâce au phénomène anaérobique de la transformation des sucres solubles en acides organiques par les microorganismes. Afin d’obtenir un ensilage d’herbe stable et de qualité, il faut s’assurer du bon niveau d’humidité du fourrage, que les plantes ensilées contiendront suffisamment de sucres, et que la vitesse du  chantier de récolte et de la mise en anaérobiose se fasse rapidement afin de favoriser les bactéries productrices de l’acide lactique.

L’aérobie ou la phase de respiration débute lorsque la plante est coupée et durant la mise en silo ou en balle enrubannée. Cette phase se termine au moment où l’oxygène est complètement utilisé. C’est un moment crucial où l’oxygène doit disparaitre rapidement afin d’arrêter la prolifération des microorganismes indésirables. Ces derniers consomment les sucres solubles qui favoriseront les bactéries de l’acide lactique. La présence de l’oxygène favorise la présence des levures et des moisissures qui continueront de se développer, générant de la chaleur, des pertes de protéines, d’énergie et de matière sèche importantes. La phase d’aérobie s’accompagne d’une augmentation de la température de l’ensilage pouvant atteindre de 9 °C à 12 °C au dessus de la température ambiante. Cette phase d’une durée de 12 à 24 heures ne devrait pas se prolonger, car on compromet le processus de conservation.

L’anaérobie débute lorsque l’oxygène a complètement disparu. Les bactéries anaérobies amorcent le processus de fermentation et les hydrates de carbones solubles sont transformés en acides organiques, alcool, gaz carbonique et autres sous-produits de fermentation. Le pH doit descendre sous 5,0 en moins de 72 à 96 heures dans un fourrage à forte teneur en luzerne. Dans le cas où le pH demeurerait élevé, les pertes de matières sèches augmenteront et il restera moins de sucres disponibles pour les bactéries d’acides lactiques; ce qui donnera la chance aux bactéries indésirables de se développer. Lorsque le pH est en dessous de 5,0, ce milieu est favorable aux bactéries de l’acide lactique. L’anaérobie est complétée quand le pH est assez bas pour inhiber toute production de bactéries. Lors de la récolte, plusieurs types de bactéries sont contenus dans le fourrage. Rien n’assure que le nombre ou l’espèce de ces bactéries nécessaires à une fermentation rapide et uniforme soit respecté. L’utilisation d’un inoculant microbien (Coop-Sile II) donne un outil supplémentaire lors de la récolte, afin d’ensiler un ensilage de qualité, de s’assurer de sa conservation, de sa valeur nutritive et pour prévenir les post-fermentations lors de la reprise.

De tous les animaux en élevage, ce sont les chevaux les plus sensibles au botulisme. Le botulisme survient lorsque la bactérie anaérobie, Clostridium botulinum, se développe et produit des toxines qui bloquent les influx entre les nerfs et les muscles du cheval. Elle cause des faiblesses musculaires qui peuvent progresser jusqu’à la paralysie, voire même la mort. Les chevaux atteints meurent parce que leurs muscles respiratoires paralysent ou parce qu’ils développent d’autres problèmes de santé. Ces signes apparaissent dans un intervalle pouvant varier entre plusieurs heures et 7 à 10 jours après l’ingestion des aliments contaminés.

La bactérie du botulisme est commune dans le sol, particulièrement dans les carcasses animales, mais sa présence est moindre dans les matières végétales en décomposition. Les ensilages en balles enrubannées, ayant une teneur en matière sèche supérieure à 65 %, ne favorisent pas la fermentation lactique et par conséquent le pH ne baisse pas assez. Ces conditions sont donc favorables au développement de la bactérie responsable du botulisme. L’ensilage peut être contaminé par des cadavres ou de la terre pendant le chantier de récolte. Afin d’éviter la présence de microorganismes indésirable qui nuisent au processus de fermentation, il est recommandé d’ajuster la hauteur de coupe de la faucheuse afin de ne pas récupérer de la terre dans le fourrage et d’éviter d’ensiler dans les champs où il y reste du fumier non décomposé.

L’ensilage devient stable lorsque le pH se situe généralement entre 3,8 et 4,5, dépendamment de l’humidité du fourrage et du type d’ensilage. La croissance des bactéries de l’acide lactique s’arrête et l’ensilage entre dans sa période stable. Si le silo est bien scellé ou que les balles sont bien enrubannées, il n’y aura presque pas d’activité biologique et très peu de perte de nutriments. Pour les balles enrubannées, s’assurer de bien respecter les recommandations du nombre de couches de film plastique pour bien sceller le contenu. Disposer les balles dans un endroit où l’égouttement de surface est idéal. Lorsque l’intégrité du film de plastique est attaquée par les chats, les oiseaux ou les rongeurs, l’oxygène entre dans l’ensilage et celui-ci se détériore.

La reprise débute lorsque l’ensilage est exposé à l’air. La surface de l’aliment dans la mangeoire peut subir une activité aérobie postfermentation. Les levures et les moisissures peuvent recommencer à croitre. Cette activité entraîne des pertes importantes de nutriments et affecte la qualité et l’appétence.

Les silos verticaux et horizontaux sont principalement utilisés pour les troupeaux importants. Pour cette raison, lors de la reprise, il faut s’assurer que le troupeau consommera suffisamment, afin d’éviter que les microorganismes indésirables recommencent à croître. La même situation peut se produire avec une balle trop grosse pour le nombre d’animaux à nourrir ou avec l’utilisation de boudins de balles enrubannées. En effet, lorsqu’une balle est prise, une surface est en contact avec l’air. Il est recommandé de fermer l’extrémité du boudin afin de respecter au mieux les conditions d’anaérobie. Il serait préférable ne pas dépasser de deux à trois jours d’exposition à l’air. Ceci exclu donc les petits troupeaux pour l’utilisation d’ensilage d’herbe.

Lorsque le film de plastique est enlevé, chercher la présence de moisissures et éviter de servir de l’ensilage contaminé. La présence de terre, de souris mortes ou de fumier indique que cet ensilage est à risque pour les chevaux. L’ensilage d’herbe, lors de la reprise,  aura une odeur agréable, sera de couleur marron et sera appétente. Ceci représente un avantage en ce qui concerne les chevaux qui ont souvent moins d’appétit. Dans des écuries avec un nombre de chevaux important, l’utilisation de balles d’ensilage permet une manutention économique par rapport à la distribution du foin.

Au niveau nutritionnel, il faut vous procurer un fourrage approprié à vos chevaux. Les juments poulinières et les chevaux en croissance ont des besoins en protéines plus élevés, tandis que les chevaux de compétition ont des besoins énergétiques plus élevés que les chevaux à l’entretien.

Indépendamment de l’espèce fourragère, moins l’ensilage sera fibreux, plus le cheval en ingèrera, et plus il sera digéré facilement. C’est pourquoi il faut choisir un fourrage qui possède des tiges minces et un ratio feuilles/tiges élevé. Étant donné que la maturité de la plante avance avec le temps, la quantité de fibres augmentera aussi et la digestibilité du fourrage en sera compromise. L’espèce de graminée la plus populaire est la fléole des prés, communément appelée le mil. Cette plante convient à l’alimentation de la plupart des chevaux, par contre, son apport en protéine demeure limité pour des sujets en croissance et les chevaux ayant des exigences nutritionnelles élevées. Il existe aussi les légumineuses qui se composent principalement de luzerne ou de trèfle et se caractérisent par leur haute valeur nutritive. Ce type de plante est riche en protéine et en minéraux comparativement à celui majoritairement de graminées. La plupart du temps, les graminées et les légumineuses sont semées en mélange afin d’obtenir un fourrage équilibré en éléments nutritifs. Il est conseillé de ne pas dépasser 50% de légumineuses par rapport aux graminées dans le fourrage afin de ne pas trop augmenter la valeur en protéine de la ration. Les ensilages exclusifs de légumineuses sont à éviter car ils sont très mal consommés et entraînent des dysfonctionnements dans le gros intestin. Il faut se rappeler que le taux de matière sèche peut varier d’une balle à l’autre. Plus l’ensilage sera humide, plus gros sera le volume à distribuer au cheval, car plus petit sera la valeur nutritionnelle par kilogramme de fourrage.

Finalement, l’utilisation de l’ensilage s’avère être un avantage important dans l’alimentation des chevaux, mais comportes plusieurs points à tenir compte et à maîtriser afin de garantir la sécurité et la santé de vos animaux. Il est souhaitable de valider le choix de l’utilisation de l’ensilage d’herbe avec votre Expert-Conseil et d’avoir un programme de vaccination adéquat avec votre vétérinaire afin d’obtenir le succès souhaité. Bonne réflexion!

Par Martin Couture, t.p. Expert-Conseil production laitière, La Coop Novago