Publié le 29 décembre 2014
16 novembre 2014, la récolte de maïs et de la fève soya étant à toutes fins terminées, nous pouvons maintenant dresser un portrait réaliste et précis de la qualité de ces deux cultures. La fève soya nous a agréablement surpris de par la qualité de la récolte reçue. Très peu de chargements ont été déclassés à cause d’un problème de fève gelée, sclérotinia ou autre, lors des réceptions. De plus, l’ensemble de la récolte s’est fait à un niveau d’humidité très acceptable. Les rendements entendus oscillaient autour de 2,5 tm/ha, ce qui devrait tout de même nous donner une récolte record au niveau de la province, compte tenu des superficies ensemencées au printemps.
La récolte de maïs, de son côté, fût plus variable quant à la qualité. Cela s’explique d’abord par des niveaux de toxine relativement bas, mais des poids spécifiques qui varient énormément, puisque lors de la réception nous avons pu observer des poids de 59 kg/hl (classe n° 5) jusqu’à 69 kg/hl (classe n° 2). Plusieurs facteurs pourraient expliquer cette grande variabilité, notamment la date de semis, la variété ensemencée et le type de sol. Il est toutefois trop tôt pour quantifier la proportion de chaque classe de la récolte provinciale. Quant au rendement, celui-ci semble ne pas avoir trop déçu les producteurs, puisque certains ont parlé de 10 à 11 tm/ha. Peut-être s’attendait-on à pire, si on tient compte de la gelée mortelle survenue en septembre et qui aurait un effet direct sur le manque de maturité, ainsi que sur le poids spécifique plus faible.
Les niveaux d’humidité (environ 23 à 28 %) pourraient être jugés relativement bas pour une année semblable puisqu’on se serait attendus à des taux supérieurs, le fait d’avoir retardé avant de récolter a été une sage décision, car cela à minimiser les coûts de séchage. Nous avons aussi pu observer que peu de maïs avait été mis en vente lors de la récolte et ce, dû à plusieurs facteurs comme la disponibilité des silos d’entreposage, un besoin moins pressant de liquidité suppléé par la récolte de fève soya et, vraisemblablement, par un certain optimisme à voir les prix augmenter au cours de l’hiver.
Si nous avons connu une récolte de maïs ordinaire, il en fut tout autrement au sud de la frontière. En octobre dernier, nos voisins ont connu des rendements de 173,4 b/acre comparativement à 158,8 l’an dernier et 123,1 en 2012. Ces rendements leur apportent une récolte record de 14,407 milliards de boisseaux, ce qui contribuera à rehausser les inventaires de fin d’année de 1,236 à 2,008 milliards de boisseaux. Contre toute attente, les prix ont quand même grimpé au cours de la récolte, car beaucoup de producteurs préfèrent attendre avant de mettre leur récolte en vente au prix actuel. Les besoins pour l’alimentation animale ayant repris du poil de la bête créent une forte pression sur la demande de maïs, tout comme le marché de l’éthanol, dont les ventes ne cessent de croître suite à l’augmentation du pourcentage requis dans l’essence.
Même phénomène pour la fève de soya américaine, avec une récolte de 3,958 milliards de boisseaux, qui amène les stocks de fin d’année de 92 à 450 millions de boisseaux. Les rendements, quant à eux, ont été de 47,5 boisseaux/acre comparativement à 44 boisseaux/acre l’an dernier. Fait étonnant dans la tendance des prix du complexe soya, les prix ne cessent de se raffermir et ce, pour diverses raisons. On peut remarquer que malgré une récolte record et que les ventes américaines à l’exportation demeurent fortes depuis le début de l’année 2014-2015, cela demande beaucoup d’énergie aux exportateurs pour couvrir leurs besoins, puisque les producteurs étaient, jusqu’à tout récemment, peu enclin à vendre leur récolte. Ensuite, le transport par rail reste difficile tout comme celui par bateau sur le Mississippi. Il est vraisemblable de penser que la mobilisation des locomotives pour le transport du pétrole peut avoir une influence.
De plus, l’arrivée hâtive d’une vague de froid et de précipitations de neige a ralenti les efforts de logistique, tout en créant une demande pour le tourteau de soya déjà fort sollicité. Pour conclure, les fonds spéculatifs profitent de la tourmente pour ajouter une certaine volatilité dans le marché par rapport à la situation Sud-Américaine, où l’on voit un retard dans les semis de fève soya au Brésil, causé tantôt par un manque d’humidité ou tantôt par un excès de pluie. Ce retard influencera aussi la quantité de maïs pouvant être ensemencée.
Lors du récent rapport USDA, le réajustement à la hausse de la récolte de fève de soya américaine a amené la production mondiale à un nouveau record de 312,09 millions de tm. Fort heureusement, la Chine continue d’avoir un appétit insatiable pour cette oléagineuse et contribue à la consommation mondiale de 285,82 millions de tm. Cet équilibre offre/demande aide à maintenir une prévision de prix entre 9,00 et 11,00 $ pour les prochains mois.
En conclusion, malgré le fait de connaître des récoltes records tant en maïs qu’en fève soya, on n’aperçoit pas, pour le moment, de tendance d’effondrement de prix.
Source : Doane report, GrainWiz, USDA report.
Par Jean-Pierre Aumont, T.P. Directeur service des grains,