Publié le 17 mars 2017
La famille Mathieu est propriétaire depuis 5 générations de la Ferme Caribou, située à Terrebonne, dans le secteur de La Plaine. Au fil des générations, la ferme a grandement évolué et s’est modernisée. Elle est gérée par Jasmin et Pascal Mathieu, les deux fils de Gilbert et Claudette. Ces derniers sont encore présents à la ferme pour les appuyer. La ferme possède 350 hectares, dont 35 en location. Les principales cultures sont le maïs, le soya et le blé. L’autosuffisance en fourrages et en maïs est atteinte. Le troupeau compte 300 têtes, dont 136 vaches en lactation qui produisent les 195 kg/j détenus.
Chacun a son champ d’expertise: Jasmin consacre son temps à la gestion du troupeau laitier et sa conjointe, Laure, s’occupe des veaux et de l’alimentation du troupeau. Le couple a trois enfants âgés de 19, 15 et 12 ans. Les deux filles aînées effectuent plusieurs tâches et l’une d’elles exploite même une petite entreprise cunicole. Leur fils ne s’implique pas encore. Pascal quant à lui est responsable de la gestion des champs et sa conjointe, Nathalie, contribue à la traite les fins de semaine et aux travaux aux champs l’été. Ils ont quatre enfants, trop jeunes encore pour se joindre aux travaux. Gilbert aide tous les jours à la traite et aime s’occuper des entretiens mineurs. Quant à Claudette, elle fait la comptabilité et l’administration de toute l’entreprise. Jasmin et Pascal se consultent pour les décisions ayant un impact majeur sur l’entreprise, et se font confiance pour les décisions relatives au fonctionnement régulier de leur département respectif. Fait surprenant pour une entreprise de cette envergure : plusieurs décisions sont prises sur une base intuitive! Évidemment, elles sont par la suite chiffrées pour être analysées et évaluées! À l’emploi depuis 2009, mais à temps plein depuis 2015, Marc-Antoine Bédard est le premier employé à temps plein engagé à la ferme. Il effectue autant les travaux aux champs qu’à l’étable et contribue aussi, avec ses idées, au développement de l’entreprise. Un second employé est dédié uniquement aux traites de fin de semaine. En 2016, les Mathieu ont arrêté de travailler les dimanches!
À la ferme Caribou, l’efficacité est essentielle dans chacune des sphères de l’entreprise. L’objectif principal est d’être le plus rentable possible, en misant sur des produits de qualité, dans le meilleur environnement possible pour les animaux, les champs et les gens qui y travaillent. La ferme a pris un virage les dernières années qui a mené à plusieurs modifications et améliorations. Pour les vaches en lait : la construction d’une stabulation libre de 151 logettes, un carrousel de traite de 20 places; l’installation de 7 ventilateurs « Big Ass Fans » de 18 et 24 pieds, la construction d’un silo-couloir pour l’ensilage de maïs, la construction et l’agrandissement de divers bâtiments. Pour les génisses et les vaches taries : la conversion de l’ancienne étable en stabulation libre, dont une partie emménagée en pouponnière pour les veaux, l’achat d’une louve et l’installation d’un automate et de convoyeurs-soigneurs. L’entreprise a aussi acheté des terres (57 ha en 1990 à 350 ha actuellement), du quota (27 kg en 1990 à 195 kg actuellement) et remplacé plusieurs machineries et tracteurs par d’autres, plus gros, plus rapides et plus performants. Au final, on parle d’un investissement de 2,5 millions au cours des trois dernières années.
Un second objectif est de continuer l’expansion de l’entreprise dans les prochaines années sans se limiter dans le nombre de vaches ou les superficies de champs. Le choix d’un carrousel de traite reflète bien cette vision à long terme. Pour les Mathieu, trouver de la main-d’œuvre fiable n’est pas, dans l’immédiat, un irritant qui pourrait les inciter à choisir un système de traite robotisée. Ils n’y voient pas suffisamment d’économie de temps et de flexibilité d’expansion.
Là où il ne peut y avoir de mécanisation, plusieurs protocoles sont mis en place afin d’atteindre les objectifs et respecter les visions de l’entreprise. Dès la naissance du veau, la qualité du colostrum est quantifiée avec un réfractomètre. Il en reçoit ensuite 4 litres et est vacciné. Le moindre signe précurseur de maladie déclenchera une série d’actions. Chaque génisse a une fiche où tout est minutieusement noté. Pour les vaches, toutes les interventions sont notées dans le logiciel de gestion de troupeau Dairyplan. Il y a un suivi post vêlage très serré afin de détecter de façon précoce les désordres métaboliques potentiels tels que l’acétonémie, les fièvres du lait, etc. Ces attentions permettent de réduire les frais vétérinaires au minimum. La détection des chaleurs se fait à l’aide de podomètres, aucune détection visuelle n’est effectuée. Les investissements récents ayant libéré du temps, ils projettent de faire eux-mêmes le taillage des onglons et l’insémination artificielle. Quant à l’alimentation, les rations sont rigoureusement suivies. Le coût et la consommation sont calculés, le prix des divers ingrédients et concentrés sont validés ponctuellement, la matière sèche des fourrages est prise chaque semaine. La stratégie est claire : utiliser les ingrédients disponibles et les moins coûteux, tout en fournissant un environnement confortable et propice aux bonnes performances du troupeau.
Depuis plusieurs années, les vaches sont saillies par les meilleurs taureaux (100 % Holstein), ce qui a eu pour effet de propulser le troupeau parmi le groupe des 10 % supérieurs selon l’IPV au Canada. Le taux de réforme est d’environ 25 % et 100 % des génisses sont élevées. Cela permet de garantir une relève suffisante et de soutenir l’accroissement du troupeau, tout en maintenant le troupeau fermé (aucun achat d’animaux). La production du quota en constante croissance est assurée par l’augmentation de la production par vache et la qualité de l’élevage. Il faut optimiser la croissance des génisses en favorisant leur développement afin d’obtenir des taures pesantes au vêlage tout en abaissant l’âge au premier vêlage, et ce, le plus efficacement possible! Chaque parc est alimenté selon le l’âge moyen des génisses qui s’y trouvent. Les rations sont également ajustées selon les fourrages disponibles et leur analyse. Les poids et hauteurs sont mesurés plusieurs fois en cours d’année afin de suivre l’évolution.
Finalement, il est possible d’avoir de bons résultats sans investir trop de temps, mais en évaluant ponctuellement les divers paramètres tels que l’alimentation, le regroupement des animaux, le contrôle de l’environnement, etc. Tout peut se faire efficacement, sans sacrifier la qualité de vie. La communication entre les membres d’affaires de la ferme est primordiale et l’élaboration d’objectifs et de projets communs sont essentiels au développement.
Chantal St-André, agr et Laurence Asselin, agr