Publié le 27 juin 2017
J’assistais les 10 et 11 mai dernier au colloque de nutrition animale du Canada, qui avait lieu cette année à Québec. Ce colloque regroupait principalement les nutritionnistes en alimentation animale du Canada, ainsi que des vétérinaires et chercheurs de différentes sphères – dont la physiologie et l’immunologie –, intéressés par le sujet principal du colloque : la production animale sans antibiotiques. Y prenaient part des conférenciers de renom venus du Canada, des États-Unis et d’ailleurs dans le monde.
Il y a plusieurs années maintenant, la communauté médicale occidentale soulevait sa préoccupation quant à l’utilisation des antibiotiques dans l’élevage des animaux destinés à la consommation humaine. Elle indiquait que l’emploi des antibiotiques, surtout en prévention, amènerait fort probablement le développement de résistance des bactéries qu’on retrouve chez les humains. La relation directe n’est pas si évidente que cela, mais il s’en est suivi chez les consommateurs une demande forte pour en cesser l’utilisation dans les élevages.
La pression actuelle s’accentue et provient principalement du commerce, qui utilise beaucoup une approche de mise en marché pour faire valoir sa demande auprès des abattoirs. Cette approche confond souvent les consommateurs puisqu’ils entendent des propos différents sur le sujet. Malgré ce fait, la pression est telle que l’industrie des productions animales n’a pas le choix d’y faire face. Il y a bien quelques années que cette méthode d‘élevage est utilisée chez nous, à La Coop. Toutefois, cette façon devient intensive dans toute l’Amérique du Nord. L’an prochain, 60 à 70 % de toute la volaille produite aux États-Unis sera dénommée sans antibiotiques!
On revient un peu à la façon d’élever le poulet des années 40-50, non sans risque. Le plus grand est bien entendu la coccidiose et l’entérite nécrotique. C’est de l’intestin que vient le problème avec, entre autres, la présence mondialement reconnue du parasite qui s’y loge et qui cause la coccidiose. L’entérite nécrotique suit malheureusement souvent, induite par une bactérie nommée Clostridium qui profite d’une agression de l’intestin pour se faire valoir.
Beaucoup de chercheurs à travers le monde tentent de comprendre ce qui se passe dans l’intestin. On étudie l’aspect physiologique (les cellules de l’intestin, leurs enzymes et leur biochimie), immunitaire (le système de défense de l’intestin contre les agresseurs pathogènes) et la population microbienne normale (le microbiome) qui favorise les bonnes bactéries.
Bien sûr, notre rôle, à La Coop, est de bien traduire tout ça. Nous travaillons d’une part avec des fournisseurs sérieux, possédant une connaissance pointue des produits qui permettent, par la santé et la nutrition, d’atteindre l’équilibre nécessaire à l’intestin. D’autre part, nous travaillons avec les producteurs eux-mêmes, en collaboration avec nos vétérinaires, agronomes et techniciens. L’objectif est d’appliquer des règles de régie strictes afin de placer les oiseaux dans le meilleur environnement possible pour minimiser le stress imposé par la coccidiose et favoriser une défense immunitaire optimale de l’intestin.
Le succès ne sera pas total, car l’équilibre de cet organe est fragile. La constatation générale dans le milieu scientifique est la suivante : aucun produit naturel, seul ou en combinaison, n’égalera l’efficacité des antibiotiques. Il est encore possible d’avoir recours à quelques produits chimiques pour contrôler la coccidiose (qui ne sont pas des antibiotiques), mais ce n’est pas la panacée. De plus, ils doivent être utilisés avec parcimonie pour ne pas créer de résistance chez les bactéries pathogènes.
Le jeu est lancé. Seuls les plus sérieux réussiront.
François Lefebvre, agr., M.Sc.